BMW M5 F10 — la tempête en costume
Il y a des voitures rapides. Et puis il y a celles qui vous prennent à la gorge, calment vos doutes, et transforment chaque départ arrêté en déclaration d’amour à la route. La BMW M5 F10 appartient à cette caste rare. Elle ne crie pas. Elle sourit en coin. Elle attend que vous posiez le pied droit, puis elle vous propulse dans un monde où le temps s’étire, la route se rétrécit, et le cœur bat plus fort que la logique.
Un V8 qui vous parle à voix basse… puis hurle
Sous le capot, le V8 4.4 biturbo (S63). 560 ch d’origine, jusqu’à 575 ch avec le Competition Package, et 600 ch pour l’édition “30 Jahre”. Le couple déborde, disponible partout, tout le temps. Pas de brutalité gratuite, mais une onde de poussée continue qui vous colle au siège et vous rappelle qu’un moteur peut être une œuvre d’ingénierie autant qu’un instrument de musique.
Avec la boîte M-DCT à 7 rapports, chaque rapport claque comme un battement de métronome. Et si vous cherchez l’exception dans l’exception, sachez qu’elle a aussi été la dernière M5 proposée en boîte manuelle (aux États-Unis). Oui, un monstre moderne qui n’a pas oublié les puristes.
La dernière M5 à propulsion
La F10, c’est la dernière M5 propulsion. La suivante, la F90, passera à la transmission intégrale pour gagner en efficacité. Ici, tout passe par l’essieu arrière et l’Active M Differential. Résultat : une voiture qui dialogue avec vous. Elle vous teste, vous jauge, puis vous récompense d’un train arrière précis, prévisible, joueur si vous le cherchez, imperturbable si vous restez propre. C’est de l’équilibre à l’allemande avec une touche de folie parfaitement dosée.
Une berline qui vit à deux vitesses
Le génie de la M5 F10, c’est d’être deux voitures en une.
En mode confort, elle est une GT civilisée : insonorisation, sièges M enveloppants, Head-Up Display, hi-fi qui submerge (le Bang & Olufsen était optionnel), tout pour avaler des centaines de kilomètres sans fatigue.
Changez de mode, descendez deux rapports, et l’habit cravate tombe. Les freins majorés (céramique carbone en option) mordent, la direction se tend, la caisse s’aplatit. Cette limousine sait danser.
Le style qui ne force rien
La F10 n’a pas besoin d’aileron démesuré ni de prises d’air caricaturales. Son charisme est silencieux : le galbe des ailes, les sorties d’échappement quadruples, les jantes M, cette posture basse et plantée. C’est la discrétion agressive. Le genre de voiture que seuls les initiés repèrent à 200 mètres, et qui laisse les autres avec une impression vague d’avoir croisé quelque chose d’important.
LCI, Compétition, 30 Jahre : trois humeurs d’une même âme
- LCI (2013) : retouches de style, optiques, multimédia peaufiné, petites améliorations de châssis.
- Competition Package : puissance portée à 575 ch, châssis affûté, échappement plus expressif, différentiel et direction recalibrés. L’arête devient plus tranchante.
- 30 Jahre (2014) : 600 ch, série limitée, teintes et finitions spécifiques. Un clin d’œil lourd de sens à trois décennies de M5.
Pourquoi elle rend les gens accros
Parce que la F10 a ce parfum de dernière fois.
La dernière M5 propulsion. La dernière M5 à double embrayage. L’une des dernières grandes BMW M à vous faire ressentir la mécanique jusque dans le bout des doigts sans filtre numérique intrusif. Elle a la modernité qui rassure et la sauvagerie qui émeut. Elle gronde, elle pousse, elle tient la route comme un serment, et pourtant elle sait se faire douce, polie, presque tendre.
Et demain, que vaut une M5 F10 ?
Le marché a déjà choisi son camp : les beaux exemplaires montent en désirabilité. Spéciales, bien configurées, historiques limpides, Competition ou 30 Jahre… tout cela devient un capital passion autant qu’un achat rationnel. Les AMG, RS et M modernes gagnent en chiffres, en écrans, en normes. La F10, elle, garde ce grain analogique qui manque déjà à beaucoup.
Ajoutez à ça son statut historique (propulsion, DCT, V8 biturbo à l’ancienne) et vous avez tous les ingrédients d’un futur classique.
Vivre avec une F10 : le pacte
Oui, c’est une M5. Oui, c’est une voiture qui mérite qu’on respecte ses entretiens : huile irréprochable, refroidissement soigné, pneus à la hauteur, freins en condition. Elle n’est pas là pour la mesquinerie. Offrez-lui ce qu’elle demande, elle vous rendra mille moments de grâce. Et si vous trouvez une auto avec carnets, factures, deux clés, entretien moteur/boîte à jour, vous tenez une pépite.
Ce qu’elle donne que les autres n’ont pas
Ce n’est pas qu’une question de 0 à 100. D’autres font pareil, parfois mieux. La différence, c’est la façon dont la M5 F10 y arrive. Cette poussée pleine, sans blanc. Cette manière de tout faire vite, bien, sans hausser la voix. Cette sensation de maîtrise absolue quand la route s’ouvre, et de confiance quand elle se referme. Vous coupez le contact, et l’odeur chaude du V8 reste, comme un rappel discret qu’il se passe ici autre chose que de la simple mobilité.
En un mot
La BMW M5 F10 n’est pas une voiture qu’on choisit pour cocher des cases. On la choisit pour ce qu’elle fait battre en nous. Elle réussit l’improbable mariage entre une berline premium exemplaire et une machine à émotions, entre la raison et l’instinct.
Elle a ce supplément d’âme qui rend les routes plus courtes, les soirées plus longues, et la vie un peu plus intense.
Si un jour vous en croisez une au petit matin, moteur tiède, embout de titane qui fume encore, sachez que quelque part, un conducteur s’apprête à vivre sa meilleure journée. Et franchement, qui peut résister à ça ?
